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La rencontre au fond du jardin

Elle se fait très tôt et pour cause, ma sœur, mon aînée de deux ans et demi et moi, sommes élevées par notre grand-mère paternelle qui était avant la retraite, couturière chez Brummel, tailleur pour homme de Paris.

(Le terme exact étant mécanicienne, ce qui me laissait perplexe car un de mes oncles était lui mécanicien mais dans l’automobile.)

De ce fait, il n’est pas rare que pour arrondir les fins de mois, elle acceptait de réaliser des retouches pour les gens du quartier et nous réalisait des tenues d’été, de cérémonies et déguisements pour la fête de fin d’année de l’école.

Le bruit de ses énormes ciseaux de tailleur, qui ne mesurait pas moins de quarante centimètres raisonnent encore à mes oreilles, tout comme le doux ronron de sa machine à coudre.

Nous habitons toutes les trois, dans un petit pavillon de banlieue du Val d’Oise, nous avons un jardin et tout au fond de celui –ci, il y a un banc de bois qui deviendra mon tout première atelier.

Je m’y installe quand Mémé et la météo le permettent avec des feuilles et une grande pochette de feutres. Je dessine des robes de princesses des heures durant.

Que je décri avec passion à ma chienne Mirka, un berger belge en transite, elle aussi chez Mémé. Transit qui n’en sera plus un après le drame.

Pour notre noël alors que nous devons avoir six et huit ans, ma sœur et moi recevons, ce que l’on appelait une “boîte à ouvrage”. Une jolie boîte

matelassée, recouverte d’un tissu plastifié et fleurie, la mienne était rose et celle de ma sœur bleue, toute deux renfermant le nécessaire aux travaux

d’aiguilles. Un cercle à broder, des tout petits ciseaux pointus, des aiguilles à coudre, broder et tricoter, un crochet, un mannequin, du fil

à coudre et à broder, des échantillons de tissus, un cannevas dont le dessin était un canard, comme Saturnin le célèbre.

Ma sœur préférant souvant la lecture, je me retrouvais seule à recevoir les premiers enseignements de couture qui consistaient à faire un nœud solide, passer le fils dans le chas, planter l’aiguille dans le tissu et pas

dans le doigt, ceci sans désenfiler et la ressortir de l’autre coté à une distance raisonnable soit un millimètre en ligne droite.

Dans la fameuse boîte se trouvait donc ce mannequin de couture, buste sur pied, aux mensurations de la célèbre poupée américaine, model que je

ne comptais pas parmi mon cheptel de quatre-vingts poupées décomptées trois ans plus tard lors de notre départ de notre pavillon adoré. Il me fallut

en sélectionner moins d’une dizaine et dire adieu aux autres qui partirent réjouirent les enfants de la maternelle toutes proche. Ce fut un crève-cœur

pour moi et un enfer pour Mémé qui l’une après l’autre les lavaient, coiffaient, rhabillaient de vêtements qu’elle confectionnait ce qui

entraînait chez moi une nouvelle sélection et un casse-tête pour Mémé.

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